Le Festival 2021 de Littérature de Emirates Airlines a organisé une session virtuelle de discussion avec l’écrivaine turco-britannique Elif Shafak pour échanger sur son dernier ouvrage « How to Stay Sane in an Age of Division » (ie Comment rester sain dans un contexte de division), classé parmi l’une des œuvres mettant en avant des incidents réels, et son dernier récit fictif « 10 Minutes 38 Seconds in This Strange World » (« 10 Minutes 38 Seconds dans ce Monde Etrange »).
Pleinement occupée par la découverte scientifique selon laquelle le cerveau humain continue de fonctionner 10 minutes après la mort, Shafak s’est demandé ce qu’il se passe à l’intérieur de celui-ci durant ces mêmes 10 minutes. « Si une partie du cerveau est en charge de la mémoire à long terme, de quoi le mort pourrait-il se souvenir ? » s’est-elle demandé. Pour cela, elle a fait mourir Laila, le personnage principal de son récit, dès le début de la fiction, pour voyager dans son esprit et pouvoir identifier ses histoires et son pays. Chaque chapitre couvre une minute de ce périple de 10 minutes.
Quant à son livre « How to Stay Sane in an Age of Division”, elle tente de mettre la lumière sur les sans-abris et les pauvres dont les cris ne sont pas entendus. A Istanbul, Shafak a cherché les tombes des exclus, des réfugiés et des sans-abris, et n’a trouvé que des numéros qu’elle a récupérés pour les transformer en personnages, chaque numéro matérialisant une histoire digne d’être racontée.
Elif Shafak a souligné que ses œuvres s’attachent à montrer le respect pour la diversité et la différence, leur relation avec le développement de la démocratie et comment cela affecte la vie de la classe ouvrière et des minorités dans les sociétés, avec l’objectif de projeter à quel point la diversité est formidable, positive et utile, et qu’il y a une connexion directe entre l’acceptation de la diversité et le progrès de la croyance en la démocratie. Shafak s’est citée en exemple : elle a été éduquée par deux femmes de deux milieux culturels différents. La première est sa grand-mère, avec laquelle Shafak et sa mère ont quitté Paris, pour vivre en Turquie, assurant par là qu’elle a acquis l’amour de la culture écrite par sa mère, alors que sa grand-mère lui a appris à aimer toutes les cultures. « J’ai pleinement réalisé que la sagesse n’est pas le produit de l’apprentissage scolaire seulement et que tout n’est pas question de rationalité ou de logique, puisqu’il y a des sujets qui dépassent l’explication » a-t-elle déclaré.
Entretemps, l’auteure turco-britannique a confié qu’elle est de multiples identités, car elle appartenait à la culture d’Istanbul et, en même temps, à la culture des Balkans. De plus, « j’ai appartenu à un plus large cercle de culture, à savoir la culture du Moyen-Orient, sans parler du fait que je suis une femme occidentale en Grande-Bretagne », a-t-elle ajouté. Estimant que le principal problème vient du fait que la société nous empêche surtout de célébrer nos identités multiples, elle a affirmé, « tout ce que nous avons à faire est de nous exprimer correctement. »
A la question « comment devenir écrivain », elle répond « vous devez être un très bon lecteur, et être très à l’écoute de ce que disent les gens. Vous devrez ensuite vous documenter sur l’idée ou le sujet que vous voulez traiter, jusqu’au moment où vous arrêterez de lire et commencerez à écrire. Pour ce faire, vous avez à faire un choix : soit vous connaissez à l’avance le récit et les incidents, soit vous écrivez sans connaître les incidents qui se dérouleront plus tard dans le chapitre suivant. »
Shafak a finalement affirmé que la vie est un voyage d’apprentissage continu, et souligné que nous devrions dire « nous ne savons pas », que nous ne devrions pas nous hâter de juger les choses ou les autres, et que nous devons toujours chercher la dignité et l’égalité dans notre voyage de vie.