Dans un entretien accordé au quotidien italien La Repubblica, l’écrivain israélien David Grossman qualifie la guerre menée à Gaza de génocide et déclare qu’il ne peut désormais s’empêcher d’utiliser ce mot. Il dit s’interroger sur ce qui a mené à une telle situation. Le simple fait que l’on puisse aujourd’hui associer Israël et le peuple juif à ce terme devrait, selon lui, suffire à alerter sur la gravité de ce qui se passe. Après des années de retenue, il affirme que les témoignages, les images et les récits des personnes présentes sur place ne lui laissent plus d’autre choix. Ce mot, dit-il, devient une avalanche qui gagne en intensité et amplifie encore la destruction.
Grossman exprime une douleur morale profonde face à ce qu’il perçoit comme une perte de repères éthiques. Il se dit dévasté d’entendre aujourd’hui, dans les médias européens, l’association des mots Israël et faim. Selon lui, cela entre en contradiction avec l’histoire du peuple juif et avec la responsabilité morale qu’Israël a toujours prétendu incarner envers toute personne humaine. Pour l’écrivain, c’est l’occupation des territoires palestiniens en 1967 qui marque le début de cette dérive. Il la décrit comme une corruption progressive du pays par le pouvoir absolu que lui a conféré sa supériorité militaire.
Lauréat du prestigieux prix Israël en 2018, David Grossman est l’un des auteurs les plus traduits et primés de sa génération. Depuis des décennies, son œuvre explore les tensions entre mémoire, conflit et humanité. Par ses mots, il refuse le silence des intellectuels en temps de guerre. Il rappelle que la littérature peut encore porter un regard lucide sur l’histoire en train de s’écrire, même lorsque celle-ci dérange profondément.



